Guerre de 14/18 - Episode 1
La découverte des lettres de mon grand-père
Avant de vous emmener aux alentours de Verdun en 1914 je voudrais vous faire partager le début de cette aventure qui à été la découverte de la correspondance de guerre de mon grand-père maternelle avec sa famille.
Je vis depuis 2005 dans la maison de mes grands-parents et je m'intéresse de plus en plus au passé de mes ancêtres. Le berceau de famille qui a vu naître 4 générations se trouve à 500 m de chez moi et le cimetière de mon village abrite de nombreux aïeux, alors forcément j'ai du mal à ignorer mes racines!
Les lettres de mon grand-père, échangées avec ses proches pendant la guerre de 1914/1918, sont restées au fond des tiroirs jusqu'à ce que la commémoration du centenaire de " La Grande Guerre" réveille les mémoires et invite mon père, en premier, à me parler de son beau-père.
C'est ainsi que, de fil en aiguille, je découvris quelques lettres chez mes parents, puis une tante me fit cadeau de toute la correspondance de sa mère et de mon grand-père qui étaient frère et soeur. Le bouche à oreille ayant fait son oeuvre, un cousin m'offrit également ce qu'il avait en sa possession. Toutes ces personnes avaient conservé ce précieux héritage en espérant, sûrement inconsciemment, que quelqu'un s'y intéresse un jour.
Les années, les décès, les successions, les déménagements, rien n'était venu perturber le voyage de ces lettres jusqu'à moi. Il était évident maintenant que je devais les mettre au propre et j'allais le faire pour mes enfants surtout, pour qu'ils sachent ce qu'avait vécu leur ancêtre et tous ces jeunes hommes partis se battre pour leur patrie.
Les cartes aux effigies de l'armée et les lettres étaient toutes parfaitement conservées. Après un classement par date, qui n'était pas toujours notée d'ailleurs, je réalisais que j'allais avoir un travail énorme; mon grand-père écrivait presque tous les jours! Je constatais tout de même qu'il manquait beaucoup de réponses et j'en fus presque soulagée.
Sur les petites feuilles à peine jaunies par le temps, une écriture fine ne laissait aucun espace vide. Je m'arrachais les yeux en essayant de suivre les lignes sans en sauter, de déchiffrer des mots qui m'étaient totalement inconnus ou de trouver la suite de certaines phrases rédigées à la verticale.
De la fenêtre où je travaillais j'apercevais le cimetière où mon grand-père est enterré. Vous allez peut être rire mais quand il m'arrivait de bloquer totalement sur son écriture je regardais dans cette direction et suppliais mon aïeul de me venir en aide.
Plusieurs mois ont été nécessaires pour ce travail. Je passais tellement de temps dans cet univers que lorsque je revenais à ma vie de tous les jours j'avais du mal à ne pas entendre les coups de canons.
Au fur et à mesure que j'avançais je découvrais un grand-père que je ne connaissais pas. C'était un jeune homme d'un autre monde, le fils d'une famille bourgeoise et aisée alors que moi je ne l'avais connu que fermier ayant du mal à joindre les deux bouts et surtout, "vieux".
Jamais il n' a raconté, à mes soeurs ou à moi, des souvenirs de cette guerre. Il y avait bien quelques médailles militaires accrochées dans sa chambre à coucher mais elles ne nous donnaient guère d'explications. Nous savions seulement qu'il avait perdu un oeil quand il était à Verdun en 1916 et que depuis il avait un oeil de verre. Que ses violentes migraines, les sautes d'humeur et son caractère irascible étaient dus à ses blessures. Qu'il était G.I.G. (Grand Invalide de Guerre) parce qu'il avait le macaron collé sur sa voiture et à part ça, rien.
C'était un grand-père qui adorait nous raconter des histoires étranges et effrayantes. Il aimait nous faire découvrir la campagne, les cultures, les animaux de la ferme et s'employait à nous poser des questions sur ce qu'il venait de nous apprendre. On le craignait beaucoup et de ce fait on le questionnait peu.
Si l'anglais vous est familier vous pouvez consulter le blog de ma fille @osm0sis The treasures left behind my great-grandfather et vous découvrirez d' autres facettes du personnage.
Robert, c’est son prénom, est né dans un petit village de Saône et Loire le 13 Août 1894 et a passé une grande partie de son enfance et de son adolescence entre Lyon et la propriété familiale de Bourgogne. A l'âge de 12 ans ses parents l'ont envoyé à Spire, dans une école allemande, où il resta deux ans. Je vous précise ce fait car il a son importance pour la suite.
Le 1er Août 1913 il devança l'appel et s'engagea dans l'armée d'Afrique. Après avoir passé 5 mois à la Manouba près de Tunis, il partit au Maroc. Quand la guerre éclata le 3 Août 1914 il fut affecté à la batterie qui arrivait de Taza. Ils descendirent l'Oued Sebou en barcasses jusqu'à la mer ou les attendait un cargo escorté d'un petit navire anglais de Gibraltar. La traversée dura plusieurs jours. A Sète la troupe pris le train via Toulouse Bordeaux, Talence, Juvisy et enfin Prunay dans la Marne.
A suivre: Guerre de 14/18 - Episode 2 - lettres d'octobre 1914