Rencontres avec l'Afrique : La terre promise

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Retour en Côte d'Ivoire.

Dans la partie 1, Juste, un jeune Ivoirien, influencé par le père d’un de ces amis d’école et encouragé par sa famille, avait pris la route de l’Europe. Une route difficile et semée d’embuches qui ne c’était pas ouverte à lui. Quatre ans et des milliers de kilomètres plus tard il se retrouve à son point de départ, Abidjan.

La partie 2 raconte comment sa responsabilité devant sa famille l’empêche de suivre la voie de son cœur et de rentrer retrouver sa famille, ses amis, sa vie au village. Il cherche inlassablement un moyen de repartir, allant de petits boulots en petits boulots pour économiser les sommes colossales, destinées à son prochain départ, très bientôt, il en est sûr.

Dernier volet de la saga de Juste, cet article raconte la réalisation de son rêve.

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Le grand départ

Juste commence à travailler à Abidjan. C’est son pays, c’est plus facile. Il se reconstruit une petite vie. Une pause salutaire dans ces années d’errance. Un petit chez lui, des amis, la vie pourrait redevenir normale. Mais la mission qu’il s’est fixée, son obsession, d’autant plus puissante qu’elle lui a était refusée sont omniprésentes.

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Il explore les possibilités, sans relâche. Il étudie tous les moyens de parvenir en Europe sans mourir dans ce désert qui l’a tellement effrayé. Il y aurait bien ce chemin déjà emprunté par la Mauritanie puis le Maroc, un bien long chemin avec le risque déjà vécu d’une trahison à Tanger. C’est au port, alors qu’il travaille au déchargement des containers, qu’il finira par entrevoir sa chance.

Des cargos quittent régulièrement Abidjan pour l’Europe, chargés de matière 1er dont le pays est producteur. Juste se débrouille pour se rendre utile à tout le monde. Il sympathise avec les équipages, les amenant dans les quartiers de fête qu’il connait bien. Payant des tournées, présentant des gens il gagne la confiance. Il visite des bateaux, se renseigne sur les endroits isolés où il pourrait se cacher. Enfin, un beau jour, il est prêt. Il déjoue la surveillance et se cache dans un cargo.

Dans son recoin inconfortable il passe de mauvais moments, trouve le temps long. Ne rentrons pas dans les détails. Il devra finalement sortir par manque de vivres. L’équipage le fait travailler, pour payer son passage, sans reproche ni punition. Il est traité aussi correctement que sa situation de passager clandestin le permet par des hommes rudes mais humains. Quand la politique n'est pas là pour atiser les haines les hommes s'entendent souvent mieux qu'on ne le pense.

Arrivée en terre promise

Le bateau arrive à Hambourg, Juste ne sait pas que c’est en Allemagne et peu lui importe. Il s’est fait des amis dans l’équipage qui fermeront probablement les yeux quand il débarquera en cachette et esquivera les contrôles.

Il se retrouve à marcher seul dans la nuit. Il fait froid. Juste ne connait pas le froid, c’est la 1er fois de sa vie qu’il voit la neige. Il ne possède que son seul tee-shirt. Il ne sait pas où il va, commence à avoir peur malgré les 6 années d’aventurier involontaire qu’il vient de vivre. Le froid l’empêche de réfléchir sereinement, de retrouver son sang froid, drôle d’expression dans ce cas précis. Désespéré il fini par s’approcher d’un grand bâtiment, frapper à la porte c’est prendre un gros risque. Tant pis pour les conséquences, il verra bien, c’est ça ou mourir de froid.

Il a de la chance cette fois Juste. Il a frappé à la porte d’un monastère et les moines vont l’accueillir. Il sera bien, il apprendra à jardiner, à parler Allemand, à cuisiner. Il apprécie cette pause, fait un peu de musique, reprend des forces, confiance en la vie. Mais l’environnement lui semble bien masculin à Juste, il commence à faire le mur et de petits tours dans la ville proche. Le charme des blondes Allemandes le fera pécher par excès de confiance, une fois de plus il est arrêté. Il finira dans un avion, direction Abidjan.

Quand je l’ai connu à Abidjan, Juste avait abandonné ses rêves de départ. Il gardait une bonne image de l’Europe qu’il connaissait maintenant un peu. Il n’y avait pas été mal mais savait que ce n’était pas le paradis du père d’Aboubacar. Il avait peut-être trouvé, au fil de ces années difficiles un certain type de sagesse qui n’avait rien á voir avec de la résignation.

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Le jardin du voisin est toujours plus joli, certains le savent instinctivement, d’autre l’admettent intellectuellement, d’autres encore ont besoin de le vérifier par eux même. Faisant partie, sans aucun doute, de la dernière catégorie, je me suis souvent interrogé. Le sens n’est pas dans le point de destination qui une fois atteint perds de son intérêt. L’important c’est les étapes qui y mènent, générant une remise en question souvent riche en apprentissage.

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L’histoire est entièrement conforme à ce que Juste m’a raconté au cours des années passées ensemble à Abidjan. J’ai changé son nom et la photo est celle d’un autre ami du même âge, faite à cette même époque. Il aurait pu être un autre Juste cet ami, mais à choisi un autre parcours. Il a fait sa vie en Côte d’Ivoire, survécu aux mauvaises années. J’ai perdu la trace de Juste dans les années de guerre, regardant souvent, encore aujourd’hui, les artistes Ivoiriens au cas où je le verrais apparaître un jour. J’espère qu’il aura lui aussi passé les années noires et qu’il a trouvé son chemin dans sa vie.

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