LE DOSSIER VALMY (Thriller) : chapitre 28 (Troisième partie)

En 2008, il ne se passera pas grand chose pour Valmy. Nos adversaires s’ingénient à repousser les audiences pour gagner du temps. Nous avons enfin reçu le rapport de l’Expert pour l’intrusion informatique. Il est accablant. Il parle de complicité. Il cite les deux chimistes comme co-auteur.

Les procédures, on le sait, c’est long! Alors nous attendons patiemment. Nous avons notre bonne foi et le droit pour nous. Si ce n’est qu’une question de temps, nous attendrons. Et ce n’est qu’en 2009 que tout commence véritablement à basculer.

Dans l’intervalle, ma vie professionnelle fonctionne à plein. Les magistrats m’ont confié un, puis six, puis trente dossiers. Mon business marche à plein. J’ai 35 ans. J’ai commencé à apprivoiser les enfants et nous allons souvent en Bretagne. J’ai rencontré quelqu’un aussi. Nous nous sommes mis en ménage. Mais le dossier Valmy ne m’a pas quitté. Il est bien dans mon esprit. J’e veux que Justice soit faite, ironie cruelle puisque je travaille pour elle aujourd’hui.

Le procès pour faux et usage de faux est programmé pour début décembre 2009. Ce procès est capital pour nous. A deux jours de l’audience, je reçois en copie un mail de mon propre avocat qui écrit à l’avocat de nos adversaires. Le texte parle de lui-même :

«Cher Confrère, voilà plus d’un an que je suis sans nouvelle de mes clients dont j’ignore même les adresses. Aussi, je vous informe que je n’entends pas plaider.»

Même notre avocat nous trahit!!!! Il n’a pas notre adresse mais il me met en copie!!!!! Je l’appelle. Il n’entend pas plaider. A deux jours du procès... Il a tout de même palper 45,000 euros dans mes affaires.

Denis et moi prenons la décision d’aller plaider seuls. Techniquement, ce n’est pas compliqué à expliquer. Mathieu n’est pas venu. Il est excusé. Alex, lui est bien présent et passablement nerveux. Son avocat semble serein. Bizarre tout de même... son client risque gros dans cette affaire.

Et l’audience démarre. Le président rappelle les faits et demande d’entrée de jeu des explications. La substitut du procureur est attentive aux débats. Je m’avance et j’explique. Comment ce document a été fabriqué, pourquoi et comment il a été utilisé devant les tribunaux d’Amiens pour tromper la religion des magistrats. L’avocat d’Alex réplique de façon très technique. Sur le fond du dossier, son client a juste voulu faire un résumé sans intention de dénaturer les documents. Le président me rappelle à la barre et me demande de refaire la manipulation. La démonstration est éclatante.

C’est au tour du procureur. Pour elle, il y a bien faux et usage de faux, et ironiquement, elle lance au Président:

• et cela se passe dans votre Tribunal.

Elle s’en remet à l’appréciation du Président pour le reste. Tout cela est positif. Denis et moi pensons avoir gagné le morceau. L’avocat d’Alex, toujours aussi serein, plaide en droit. Rien qu’en droit et remet un jeu d’écriture au Président. Le verdict est prévu pour dans quelques mois. Nous rentrons en Normandie avec le sentiment d’avoir remporté une victoire. Trois mois plus tard, le jugement tombe. Aucune condamnation. Ils sont relaxés. Avec Denis, nous ne comprenons pas. Entre temps, nous avons changé d’avocat qui se procure les minutes du procès en vue de faire appel. Et il nous explique :

• Messieurs, Voilà pourquoi vous avez perdu. Vous vous souvenez de l’arrêt Strauss Kahn? En gros, il dit quoi cet arrêt...Il dit que si il n’y a pas de préjudice, alors il n’y a pas de délit. Et dans le dossier tel que préparé par mon confrère, il n’est fait nulle part mention du préjudice que vous avez subi. Vous n’en avez donc pas!

Il aurait pu s’arrêter là mais il continue. Il a eu une discussion avec le collaborateur de notre ex avocat qui a rédigé les actes. Au départ, le préjudice avait été expliqué et c’est sur demande de son patron que ce paragraphe a été supprimé.

• Dès le départ, il avait mis dans votre dossier ce qu’il fallait pour que l’adversaire gagne. Ou plutôt enlever.

Denis et moi restons bouche béé. Notre avocat poursuit :

• ce que vous ne pouviez pas savoir, c’est que les deux avocats sont deux avocats qui se connaissent bien et travaillent pour la ligue française de Football. Ils se sont mis d’accord et pour vous, c’est terminé.

On vient de se faire mettre et bien profond pour la première fois. Il va falloir s’y habituer car la suite sera du même tonneau. Goliath savoure sa première victoire avec pour ricochet qu’il poursuit désormais David en diffamation. Et du statut de victime, c’est moi qui passe de l’autre côté du banc. Je suis devenu un prévenu. Pour avoir osé accuser un notable.

En 2009, il ne se passe rien d’autre.